C’est un tremblement de terre dans le monde de lamode française. Le géant chinois Shein, emblème incontesté de la fast fashion à l’échelle mondiale, s’apprête à passer à une nouvelle phase : après avoir dominé le web, il s’apprête maintenant à arriveren magasin physique. Un événement inédit pour la marque, qui lancerasix points de vente situés en France, dont le BHV Marais à Paris et plusieurs Galeries Lafayette.
Un acte qui, pour ceux qui regardent, résonne comme unedéclaration de guerre au secteur du prêt-à-porter français, déjà fragilisé par des années de crise. Certains considèrent cela comme le coup de grâce infligé à un marché en grande souffrance.
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Un domaine déjà affaibli face à un adversaire redoutable.
Le calendrier ne pouvait pas être plus évocateur. À peine deux jours après l’annonce de l’arrivée deSheinen magasin, la marque françaiseIKKS a été placée en redressement judiciaire. Un événement qui vient s’inscrire dans une série étendue de faillites ou de réorganisations :Camaïeu, San Marina, Jennyfer, GAP, Naf Naf, Kookaï ou encore Pimkieont toutes vacillé ou se sont évaporées du panorama français.
Depuis trois ans, le secteur de la mode tricolore connaît un déclin, entraîné par une combinaison de facteurs : laaugmentation des frais de production, la baisse du pouvoir d’achat, la pression écologique et surtout, la concurrence du e-commerce international. Parmi les responsables fréquemment cités, un nom émerge systématiquement :Shein, le géant chinois aux tarifs inégalés.
Avec 23 millions de clients en France, la marque serait déjà représentée3 % des dépenses publiques nationalesen habillement et en chaussures. Une proportion énorme pour un acteur qui reste jusqu’à présent uniquement numérique.
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L’inauguration de boutiques : la dissolution du dernier bastion.
« Ce n’est certainement pas une nouvelle favorable pour le secteur », avertit.Pascale Hébel, économiste et expert en comportement des consommateurs. En lançant des magasins,Shein se dote d’une légitimité nouvelle: celle d’une enseigne désormais bien établie dans le paysage urbain français.
Jusqu’à présent, les commerces locaux bénéficiaient d’un avantage considérable :la proximité physiqueavec les clients. En effet, bien que le commerce en ligne soit en plein essor,80 % des acquisitions de vêtementsse trouvent toujours en magasin. Ce lien tangible, cette option d’essayer avant d’acheter, représentait la dernière limite face à l’essor de la mode rapide en ligne.
En s’établissant dans des sites emblématiques tels que lesGaleries LafayetteShein écarte cet atout d’un geste désinvolte. « C’est une brillante manœuvre », reconnaît.Laurence Toy-Riont, Responsable Senior chez Pixis Conseils. « L’entreprise va améliorer sa visibilité, son image et sa crédibilité, surtout auprès des consommateurs qui n’avaient pas encore osé se lancer en ligne. »
Pour Pierre Talamon, président de la Fédération nationale de l’habillement (FNH), le bilan est préoccupant :
« C’est une concurrence injuste. Shein ne respecte pas les mêmes règles : elle ne se conforme pas à nos normes, et elle reste floue concernant la qualité, l’origine ou les conditions de travail. Comment peut-on se battre dans de telles circonstances ? »
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Des appréhensions sur le plan économique… mais également sur le plan symbolique.
L’arrivée de Sheinen boutique ne représente pas uniquement un changement sur le plan commercial : elle possède uneportée culturelle et symbolique. La marque chinoise fait son apparition dans lecentre de la mode internationale, à Paris, capitale du raffinement et de la mode haut de gamme.
Pour les artistes français, c’est une véritable dégradation. En effet, la fast fashion, fréquemment critiquée pour ses méthodes sociales et environnementales catastrophiques, s’immisce désormais dans le domaine d’un pays qui a longtemps été perçu comme laville symbole du chic et de la sophistication.
Et le timing ne pouvait pas être plus sensible : les marques françaises sont déjà en compétition poursurvivre à la crise. En présence d’un compétiteur capable de fabriquer1.000 nouveaux designs chaque jour, à des prix 20 à 40 % de réduction par rapport aux prix habituels.la compétition, le choc promet d’être sévère.
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Cependant, c’est un enjeu audacieux pour Shein.
Cependant, tout n’est pas acquis pour le géant chinois. Bien que sa présence en magasin va consolider sonimage de marque, elle pourrait aussi diminuer certains de ses atouts stratégiques.
Tout d’abord, sa force s’appuie sur un modèle devente exclusivement en ligne, ce qui lui donne la capacité d’évaluer des milliers de produits quotidiennement et de les retirer immédiatement en cas de problème. Il est impossible de reproduire cette flexibilité dans le monde réel.
Par la suite, l’ouverture de boutiques l’oblige à“suivre les mêmes règles que les autres”, rappelle Pascale Hébel. L’anonymat sur internet est terminé : en magasin, les clients auront la possibilité detoucher, voir, comparer. À ce moment-là, la véritable qualité des produits pourrait être confrontée à un test.
« Shein, ce n’est pas vraiment de la haute qualité, et cela se remarque beaucoup plus en boutique », ajoute-t-elle.Laurence Toy-Riont. Une confrontation directe avec la réalité pourrait nuire à l’image de la marque face à un public plus exigeant.
Enfin, la polémique grandissante autour des conditions de production et de la pollution textilepourrait ralentir sa croissance. La marque fait son entrée dans une période où les consommateurs prennent de plus en plus conscience des enjeux dedurabilité et de consommation responsable.
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Une attaque qui pousse la mode française à se renouveler.
Face à ce nouvel adversaire, la mode françaisen’a pas d’autre option que dese réinventer. D’après les spécialistes, les entreprises qui réussiront à perdurer seront celles en mesure demiser sur la différenciation: excellence, expertise locale, clarté, responsabilité environnementale, ainsi qu’un service client sur mesure.
Car si Sheinreprésente la vitesse et la capacité, elle ne peut pas se mesurer à l’authenticité ni sur la valeur émotionnelled’un produit de qualité. C’est à ce moment-là que les artistes français peuvent encore se démarquer.
« C’est brutal, mais cela constitue également un choc positif nécessaire », pense.Laurence Toy-Riont« À l’instar d’Uber dans le secteur du transport, Shein remet en question un système en difficulté. Certains ne résisteront pas, mais ceux qui sauront s’adapter en sortiront améliorés. »
En d’autres termes, la fast fashion n’indique peut-être pas la fin de la mode française, mais samétamorphose.
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En résumé
L’ouverture prochaine de six boutiques Shein en Francesymbolise un moment clé dans l’univers de la mode prêt-à-porter. Tandis que les marques françaises ont du mal à se redresser, l’entrée du géant chinois sur le marché national risque de bouleverser un secteur déjà en difficulté.
Cependant, cette présence physique pourrait également jouer en défaveur de Shein, qui devra désormais faire face auxrègles du commerce traditionnel et la méfiance croissante des consommateurs.
Il reste à déterminer si le public français optera pour lavitesse et le prix… ou la qualité et la durabilité. Il est certain que l’arrivée de Shein dans le monde physique aura un impact sur tout le monde.
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